Quelle est la proposition du gouvernement ?
Dans un contexte particulièrement tendu sur fond de montée progressive mais certaine de l’inflation, une question préoccupe le paysage locatif aussi bien du côté des locataires que des propriétaires : comment affronter la hausse des loyers prévisible avec la montée attendue de l’inflation dans les prochains mois ? La loi autorise les propriétaires à augmenter les loyers chaque année, en se basant sur l’indice de référence des loyers (IRL), lui-même indexé sur l’inflation. Avec une hausse de l’IRL à +2,48 %, les compteurs de prévision de la hausse des loyers s’affolent, et pour compte. Un locataire d’un logement de 50 m² verrait son loyer augmenter de plus de 10 € par mois, en moyenne. Un constat qui pèse lourd sur le portefeuille des Français locataires, dont le logement est la première dépense, représentant plus de 20 % de leur budget.
Quand le pouvoir d’achat est au cœur de tous les débats, le gouvernement laisse planer le mystère sur sa prise de décision pour couper l’herbe sous le pied à cette flambée des prix des loyers annoncée par les experts. À ce sujet, Le Figaro rapporte les informations d’une audition des représentants des propriétaires et des locataires organisée par le gouvernement, à la recherche du meilleur compromis pour ne léser aucune des deux parties. Parce que c’est bien de cela dont il s’agit : trouver le juste équilibre pour aider à la fois les locataires sans pénaliser les propriétaires. L’inflation n’épargnant aucune catégorie, la problématique de la hausse des loyers s’annonce ardue à résoudre. D’un côté, le gel des loyers est défendu par les associations, et soutenu par Jean-Luc Mélenchon, de l’autre Élisabeth Borne se montre plus timorée sur la question. Le Figaro relève, à juste titre, l’inquiétude de Bercy, qui en étudiant la question redoute qu’une telle mesure n’accentue la pénurie de logements. Le gel des loyers pénalisant les propriétaires, pourrait freiner un grand nombre d’entre eux à conserver leur bien locatif sur le marché. Lors d’une entrevue avec Le Figaro, le président de l’Union nationale des propriétaires immobiliers relayait ses échanges avec Bruno Le Maire à ce sujet. Ce dernier, non-favorable au gel des loyers, demanderait aux propriétaires en contrepartie de réaliser « un effort équitable ».
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Les propriétaires bailleurs sont-ils si aisés qu’on l’imagine ?
Le sujet sur le feu, la hausse des loyers s’empare des élections législatives à quelques semaines du premier passage des Français dans les urnes. Jean-Luc Mélenchon inévitablement opposé aux tendances gouvernementales sur le sujet en tant que fervent défenseur du gel des loyers, dégaine une étude de l’Insee datant de 2021, pour appuyer ses arguments. Ainsi, il annonce sur BFM TV que « 3,5 % de la population possède 50 % des logements mis en location. » Les chiffres énoncés par le porte-parole d’extrême gauche, bien qu’exacts, s’éloignent cependant de la véritable problématique énoncée. Élisabeth Borne s’inquiétant du sort réservé aux retraités bailleurs après une telle décision, invite plus à réfléchir sur la part de cette catégorie de propriétaires et sur leur niveau de vie. C’est pourquoi Le Figaro s’est penché sur cette même étude de l’Insee, démontrant que plus de 58 % des propriétaires font partie de la catégorie sociale « aisée » et 19 % de celle des « pauvres ». Toutefois, le média émet une réserve quant à la justesse de ces informations, qui peuvent être biaisées par le fait qu’elles n’établissent pas de distinguo entre les propriétaires bailleurs et les occupants. L’Anil complète par ailleurs ces données, avec une étude réalisée en 2020 auprès de 2 100 propriétaires bailleurs. Sur cette fourchette d’interrogés, la majorité des sondés s’avère être des retraités (40 %), en face de cadres supérieurs (22 %). 42 % d’entre eux déclarent avoir entre 60 et 74 ans, et 9 % seulement ont moins de 40 ans.
Quels sont les revenus des propriétaires bailleurs ?
Toujours selon la même étude de l’Insee, 54 % des propriétaires bailleurs ne dépasseraient pas la barre des 46 000 euros net de revenus par an et 29 % d’entre eux dépasseraient ce seuil, et toucheraient plus de 4 000 euros net par mois. Enfin, la grande majorité, à 85 %, ne détiendraient pas plus de deux propriétés. Loin des idées reçues sur le niveau de vie particulièrement élevé des propriétaires bailleurs en France, cette étude démontre la part importante de retraités concernés, et de bailleurs bien en-dessous du seuil de richesse. Parmi les 7 millions d’investisseurs concernés, la plupart sera donc également touchée par les répercussions de la montée de l’inflation. Le revenu locatif a été pensé par les retraités pour pallier une retraite trop faible et stratégiquement étudié comme un véritable complément de revenu dont certains ne peuvent se passer pour maintenir un niveau de vie décent. Or, entre les charges d’entretien de copropriété, les loyers impayés, sans parler des nouvelles normes énergétiques exigées par l’État pour maintenir son bien à la location, les propriétaires bailleurs ne pouvant se passer de loyer, risquent de se retrouver en difficulté financière si le gel des loyers voit le jour alors que les dépenses pour maintenir leur bien continuent de prendre de l’ampleur. C’est donc un défi de taille qui s’annonce pour réussir à trouver l’équilibre entre les deux parties, et diminuer au maximum l’impact de l’inflation sur la hausse des loyers.