20 milliards € de fraudes détectés par le fisc en 2024
Des chiffres historiques. Le plan de lutte gouvernemental contre les fraudes aux finances publiques lancé par le Gouvernement en juin 2023 a porté ses fruits : sur les 20 milliards € de fraudes enregistrés en 2024, 13 milliards ont été récupérés. Pour y parvenir, Bercy n’a pas lésiné sur les moyens :
- Un renforcement du contrôle fiscal : l’administration fiscale dispose de nouvelles ressources humaines et d’outils technologiques de plus en plus précis.
- Une meilleure coopération entre les services : le partage de données et le recours croissant à l’intelligence artificielle (IA) permettent de repérer plus vite les incohérences déclaratives.
- Un cadre législatif durci : plusieurs dispositions dans les lois de finances successives ont élargi le champ et la durée des contrôles.
L’objectif du Gouvernement est de doubler le montant des fraudes détectées d’ici à 2029.
Une nouvelle unité de renseignement fiscal
Parmi les leviers actionnés pour atteindre cet objectif, on retrouve donc la création d’une unité de renseignement fiscal. Spécialisée dans le décryptage des montages complexes, cette entité réunit des experts capables de traquer les schémas les plus sophistiqués, comme les fausses domiciliations fiscales à l’étranger, les structures écrans ou holdings opaques ou les dissimulations d’actifs numériques.
Pour appuyer ces spécialistes, 25 recrutements sont prévus au sein de cette unité en 2025. Au total, ce sont 147 nouveaux postes qui devraient être créés pour soutenir l’ensemble de la Direction générale des Finances publiques (DGFiP). Un renfort qui s’ajoute aux 800 emplois créés ces trois dernières années.
Contrôle fiscal : cap sur l’IA et le croisement des données
L’autre outil déployé par Bercy dans sa lutte contre les fraudes : l’IA et plus précisément le data mining. Concrètement, il s’agit d’utiliser des algorithmes puissants pour éplucher de gigantesques volumes d’informations (déclarations fiscales, dossiers de prestations, transactions bancaires, etc.) et repérer automatiquement des comportements suspects. Plutôt que de réaliser des contrôles à l’aveugle, l’administration fiscale priorise désormais les dossiers à haut risque et les erreurs ou incohérences sont détectées plus vite. Autrement dit, la traque des fraudeurs gagne en rapidité et en fiabilité.
L’allongement du délai de reprise fiscale à dix ans
Pour rappel, jusqu’ici, l’administration fiscale disposait d’un délai de trois ans (pouvant aller jusqu’à cinq ans en cas de fraude avérée) pour rectifier une situation irrégulière. Avec les dernières mesures votées, ce délai passe désormais à dix ans lorsqu’il s’agit de :
- Fausses domiciliations fiscales à l’étranger,
- Non-déclaration de portefeuilles d’actifs numériques détenus à l’étranger.
Le principal avantage de cette extension est qu’il donne davantage de temps aux enquêteurs pour mener des investigations parfois longues et complexes. Pour les particuliers, il s’agit d’une évolution majeure, car les sanctions sont possibles jusqu’à dix ans après les faits.
Avec la refonte de la convention DGFiP-Urssaf, les données seront mieux partagées pour traquer plus efficacement la fraude et simplifier les démarches des usagers.
La « procédure flash » : un rempart contre les fausses déclarations
Autre évolution marquante : l’instauration d’une « procédure flash ». Concrètement, si le fisc détecte des incohérences flagrantes (usurpation d’identité, faux comptes bancaires, montants de prélèvement à la source manipulés…), il peut bloquer le remboursement ou le crédit d’impôt en attente, exiger des pièces justificatives supplémentaires pour prouver la légitimité des sommes réclamées ou encore suspendre la restitution tant que la situation n’est pas clarifiée.
L’objectif est de prévenir la fraude en amont plutôt que de la réprimer a posteriori. Cette mesure s’applique dès la campagne de déclaration des revenus, qui démarrera cette année le 10 avril. Les contribuables devront donc s’assurer de la conformité de leurs informations pour éviter tout gel de leur remboursement.
Les crypto-actifs, la cible prioritaire de Bercy
En 2024, le gouvernement a également mis l’accent sur les crypto-actifs. Les détenteurs de portefeuilles virtuels sont désormais soumis à des contrôles renforcés :
- Déclaration obligatoire des comptes et portefeuilles : chaque contribuable doit mentionner ses avoirs numériques, y compris ceux hébergés sur des plateformes étrangères.
- Délai de reprise fiscale porté à dix ans : comme pour les fausses domiciliations, l’administration fiscale peut revenir sur une décennie pour vérifier les déclarations de crypto-actifs.
- Formation spécialisée des agents : des équipes dédiées ont été créées pour analyser la blockchain, retracer les transactions et identifier les bénéficiaires effectifs.
L’objectif du fisc ici est d’éviter que l’expansion des monnaies virtuelles n’ouvre de nouvelles brèches.
Ce tournant dans la politique antifraude s’inscrit dans une ambition plus large : renforcer l’équité fiscale et dégager des ressources supplémentaires pour les finances publiques. De son côté, Thomas Cazenave entend pousser le curseur un peu plus loin avec sa proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les fraudes aux aides publiques. Adopté à l’unanimité à l’Assemblée nationale fin janvier, ce texte sera examiné par le Sénat à partir du 2 avril.
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