Une décision de la Cour de cassation qui change la donne
Les points de différence entre les statuts de LMNP et LMP sont précis et clairement énoncés par la loi. En revanche, ce qui est moins évident est le statut à adopter quand on acquiert plusieurs logements ? Selon le verdict rendu le 20 mai 2020, par la Cour de cassation, souscrire à plusieurs prêts immobiliers en vue d’acheter plusieurs logements, avec l’intention de les louer, fait perdre au propriétaire son statut de consommateur. Par conséquent, ce dernier est soumis aux règles régissant le statut de professionnel, et ne peut bénéficier des avantages et de la protection du code de la consommation.
« Vu l’article L. 312-3 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-949 du 27 juillet 1993 : Selon ce texte, ne relèvent pas des règles propres au crédit immobilier à la consommation, les prêts destinés à financer l’activité professionnelle, fût-elle accessoire, d’une personne physique qui, à titre habituel, procure des immeubles ou fractions d’immeubles en propriété ou en jouissance. »
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 20 mai 2020, 19-10.403, Inédit.
Le glissement législatif de « consommateur » à « professionnel »
Sans avoir caché ses intentions lors de la souscription des prêts bancaires, le particulier concerné par cette décision s’était retourné contre sa banque, après que cette dernière lui ait réclamé le remboursement immédiat des crédits suite à des difficultés financières. En effet, selon l’intéressé, l’établissement bancaire exigeait le remboursement des intérêts alors que les faits étaient prescrits depuis plus de deux ans. De plus, le contribuable a certifié que la banque n’a pas respecté le délai légal de 10 jours de réflexion au moment de la signature des offres de prêt. Deux points contraires au code de la consommation.
Toutefois, la Cour de cassation a fait justement remarquer que la souscription à plusieurs crédits coïncidait avec l’acquisition d’une dizaine de logements destinés à être loués, ce qui veut dire le démarrage d’une activité professionnelle. En effet, les revenus générés par ces futurs loyers seraient nécessairement supérieurs à 23 000 €. Or, ce montant correspond au plafond annuel de revenus générés par l’activité de loueur en meublé non-professionnel. La Cour de cassation n’a donc pas donné raison au plaignant. Par conséquent, ce dernier ne peut bénéficier du code de la consommation.
Justice : des précédents dans la définition du terme « loueur professionnel »
Si cette décision change la donne pour les investisseurs, ce n’est pas la première fois que la Cour de cassation statue sur le statut de loueur en meublé professionnel. En 2019, la Cour avait jugé qu’un médecin pouvait être considéré par la loi loueur en meublé professionnel alors qu’il soutenait n’être « professionnel » qu’en médecine. En 2016, elle avait confirmé qu’un particulier sans profession pouvait être considéré comme professionnel s’il souscrivait un crédit afin de construire un logement en vue d’une revente ou d’une location, même si cette activité de LMP est temporaire. Enfin, en juin 2017, la Cour de cassation avait déjà affirmé que l’acquisition de plusieurs logements locatifs pouvait à elle seule faire perdre la qualité de « consommateur » dans les relations avec la banque.